lundi 8 novembre 2010

dimanche 7 novembre 2010

Je n'ai pas voulu que tu me vois feuilleter tes vieux albums. Tu ignores toujours que j'ai profané tes fantômes. Je me suis cachée pour respirer l'odeur de la vieille colle.
Elle lui ramène le vélo à la réception de l'hôtel comme à chaque après-midi. Elle a les cheveux emmêlés par le vent de la côte. Le pull noué autour de sa taille fait bailler son chemisier. Il lui dit merci. Elle lui dit merci. Il ajoute à demain peut-être.


Il lui dit si tu veux je te montre à quoi ressemble la vrai côte bretonne l'indocile la furie La Sauvage. Elle n'est pas impressionnée. Elle connait les eaux mordantes de la Mer du Nord. Elle lui répond demain peut-être.
ne revenez pas les arbres ont grandi il ne reste rien de votre enfance ils encerclent maintenant la maison et je ne parviens plus à me rappeler les plaines du Zaïre
On a dérangé la petite fille dans sa lecture. Elle tient sur ses genoux une bande-dessinée ouverte. Quick et Fluke préparent un mauvais coup et l'agent surveille de près les deux garnements. La petite fille a le sourire figé. Elle se tient trop droite sur sa chaise. On lui aura semoncé de se redresser pour la photographie. Au verso, R. Dupont Photographe 54, Avenue Emile Max Schaerbeek 1962 aura orchestré cette mascarade.

vendredi 5 novembre 2010

La noce

Le noir de son complet à lui le blanc de sa robe à elle le grège que l'on sait blond de ses cheveux à lui le charbon que l'on sait châtain de ses cheveux à elle dessinent à l'image de leurs bras enlacés la variable inconnue de la photographie.

jeudi 4 novembre 2010

Tu aimes t'asseoir sur la chaise d'osier près de la fenêtre quand tu téléphones. Tu écartes les stores avec ta main libre parce que le contact froid du plastique entre tes doigts t'apaise. Tu arques la nuque pour regarder les gens marcher sur le trottoir. Tu croises les jambes et ta jupe remonte sur tes cuisses et tu me montres ta culotte.
Quand tu me téléphonais, l'automne 1978, j'aimais m'asseoir à la grande fenêtre du salon. Il fallait que je tende tout à fait le fil de l'appareil pour y parvenir. Une fois le combiné coincé entre mon épaule et mon menton, j'étirais la jambe pour attraper la chaise d'osier du bout du pied. Concentré à ne pas laisser choir le téléphone et à ne pas exercer une tension trop grande avec mon corps, ce qui aurait débranché la ligne téléphonique, je n'entendais jamais réellement tes premières paroles. Ce n'est qu'une fois calée en indien, ma jupe se soulevant sur mes cuisses croisées, que je t'écoutais me raconter les nouvelles de là-bas. J'aimais te parler assises devant la fenêtre donnant sur la rue Côte Sainte-Catherine. T'entendre me dire ces lieux et ces gens qui étaient encore moi alors que je regardais vivre ces lieux et ces gens qui devenaient moi me permettait de conjuguer le choix de mon départ au présent. Je parlais peu. Je préférais le son de ta voix, inconstante quand tu t'affairais à préparer le repas du soir ou reposée quand tu téléphonais depuis le poste accroché au-dessus de ta machine à coudre. Parfois, papa ou Paul te volaient le temps d'une question, me saluant en différé. J'attendais que tu me reviennes. Tu me rappelais inévitablement que Alain rentrait à la maison pour Noël. Nous serions tous les sept. Au fil de tes appels, l'érable du voisin rougissait. Ton dernier appel a été à la fin d'octobre. Je n'ai jamais vu l'arbre dénudé de ses feuilles. Cette fois-là, je n'ai pas pensé à aller m'asseoir à la fenêtre du salon. Il était quatre heures du matin. J'ai très bien entendu tes premières paroles. Paul ne serait plus là pour Noël.

samedi 30 octobre 2010

L'homme est sorti en claquant la portière. Il n'est déjà plus dans son rétroviseur qu'une mince ligne parmi les hauteurs assourdissantes des ormes. L'autre ira seul au mariage. Il n'a pas eu le temps de le mettre en garde contre les orties qui poussent au bord des chemins de Bretagne. Ce soir, il le rejoindra dans le lit et devra masser les piqûres qu'il se se sera faites aux chevilles et peut-être aux mains avec du vinaigre blanc à l'odeur âcre qu'il aura demandé à la réception de l’hôtel. Pourquoi refuses-tu de comprendre que les Églises ne veulent pas de nous?


jeudi 21 octobre 2010

La communiante se tient debout à la gauche de sa mère. Ses mains gantées présentent pieusement une bible à l'obturateur et son voile, retenu par une couronne de marguerites, s'est légèrement emmêlé dans ses boucles. La cadette, posée sur les genoux de la mère, fronce les sourcils. Ses bas blancs ont glissé sur ses chevilles. Il faudra les remonter. Derrière, le père et le fils aîné tournent leur tête vers la droite, souriant à je ne sais quelle apparition.

Qui êtes-vous ?

Ma photo
On pourrait se dire: à quoi bon continuer, la courbe ne rejoindra jamais l'axe. Moi je dis: on s'en fout. Alors, faute de mieux, je tends vers.